Convention de l’Union Africaine sur la Coopération Transfrontalière (Convention de Niamey)


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Convention de l’Union Africaine sur la Coopération Transfrontalière (Convention de Niamey)

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  • [Ceci est la version de ce document à 27 Juin 2014.]
PRÉAMBULENous, États membres de l'Union africaine,Guidés par les objectifs et principes énoncés dans l'Acte constitutif de l'Union africaine, adopté à Lomé (Togo), le 11 juillet 2000, et le Traité instituant la Communauté économique africaine, adopté à Abuja (Nigeria), le 3 juin 1991;Réaffirmant notre attachement à la résolution AHG/Res. 16 (1) sur le principe du respect des frontières existant au moment de l'accession à l'indépendance nationale, adoptée par la 1ère session ordinaire de la Conférence des chefs d'État et de Gouvernement de l'Organisation de l'unité africaine, tenue au Caire (Égypte), du 17 au 21 juillet 1964;Ayant à l'esprit la résolution CM/Res.1069 (CXLIV) sur la paix et la sécurité en Afrique à travers le règlement négocié des conflits frontaliers, adoptée par la 44ème session ordinaire du Conseil des Ministres de l’Organisation de l’unité africaine, tenue à Addis-Abeba (Éthiopie), du 21 au 26 juillet 1986;Rappelant les dispositions pertinentes du Mémorandum d'accord sur la Conférence sur la sécurité, la stabilité, le développement et la coopération en Afrique, adopté par la 38ème session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de Gouvernement de l'Organisation de l’unité africaine, tenue à Durban (Afrique du Sud), le 8 juillet 2002;Rappelant en outre les Déclarations sur le Programme frontière de l'Union africaine adoptées par les Conférences des Ministres africains chargés des questions de frontières, tenues respectivement à Addis-Abeba, le 7 juin 2007 et le 25 mars 2010, et à Niamey (Niger), le 17 mai 2012;Déterminés à donner effet aux décisions de l’Union africaine relatives à la question des frontières, y compris les décisions EX.CL/370 (XI) et EX.CL/Déc.461 (XIV), adoptées par les 11ème et 14ème sessions ordinaires du Conseil exécutif de l'Union africaine, tenues respectivement à Accra (Ghana), du 25 au 29 juin 2007, et à Addis-Abeba, les 29 et 30 janvier 2009;Rappelant les initiatives internationales sur la délimitation et le tracé des frontières maritimes et les dispositions de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer;Convaincus qu'un cadre juridique pour la coopération transfrontalière pourrait accélérer l'intégration en Afrique et améliorer les perspectives de règlement pacifique des différends frontaliers entre les États membres;Désireux de mettre en œuvre une coopération transfrontalière efficace, nécessaire à la transformation des espaces frontaliers en zones d'échanges et de coopération;CONVENONS DE CE QUI SUIT:

Article 1 – Définitions

Aux fins de la présente Convention, on entend par:« Collectivités ou autorités territoriales », des collectivités, autorités ou organismes exerçant des fonctions territoriales locales et reconnus comme tels en vertu du droit interne des États Parties;« Comité consultatif continental sur les frontières », l’organisme établi par la Commission de l’Union africaine et composé des représentants des Communautés économiques régionales, en tant que mécanisme de mise en œuvre de la coopération transfrontalière au niveau continental;« Comité consultatif local sur les frontières », une administration ou une autorité locale frontalière reconnue comme telle en vertu du droit interne des États Parties;« Comité consultatif régional sur les frontières », l'organisme qui facilite le dialogue et la consultation entre administrations ou autorités territoriales régionales, bilatérales et locales de part et d’autre des frontières;« Commission », la Commission de l'Union africaine;« Communautés économiques régionales », les blocs d'intégration régionale de l’Union africaine;« Convention », la Convention de l’Union africaine sur la coopération transfrontalière;« Coopération transfrontalière », tout acte ou toute politique visant à promouvoir et à renforcer les relations de bon voisinage entre communautés frontalières, collectivités et administrations territoriales ou autres acteurs concernés relevant de deux ou plusieurs États, y compris la conclusion des accords et arrangements utiles à cette fin;« État Partie », ou « États Parties », tout État membre de l'Union africaine ayant ratifié, ou adhéré à, la présente Convention, et déposé les instruments de ratification ou d’adhésion auprès du Président de la Commission de l’Union africaine;« Programme frontière », le Programme frontière de l’Union africaine, tel que défini dans les Déclarations adoptées par les Conférences des Ministres africains chargés des questions de frontières, tenues à Addis-Abeba, le 7 juin 2007 et le 25 mars 2010, et à Niamey, le 17 mai 2012, et entérinées subséquemment par le Conseil exécutif de l'Union africaine;« Réaffirmation des frontières », la reconstruction de bornes frontalières détériorées sur leurs lieux d’origine, conformément aux normes internationales;« Union », l’Union africaine;« Zone frontalière », une zone géographique située de part et d’autre de la frontière entre deux ou plusieurs États voisins.

Article 2 – Objectifs

Les objectifs de la présente Convention sont:
1.promouvoir la coopération transfrontalière aux niveaux local, sous-régional et régional;
2.saisir les opportunités qui naissent du partage de frontières communes et relever les défis y afférents;
3.faciliter la délimitation, la démarcation et la réaffirmation des frontières inter-États, conformément aux mécanismes convenus par les parties concernées;
4.faciliter le règlement pacifique des différends frontaliers;
5.assurer une gestion intégrée, efficiente et efficace des frontières;
6.transformer les zones frontalières en éléments catalyseurs de la croissance, ainsi que de l'intégration socio-économique et politique du continent; et
7.promouvoir la paix et la stabilité à travers la prévention des conflits, l'intégration du continent et l’approfondissement de son unité.

Article 3 – Domaines de coopération

Les États Parties s'engagent à promouvoir la coopération transfrontalière dans les domaines suivants:
1.la cartographie et l’information géographique, y compris la topographie;
2.le développement socio-économique, y compris en ce qui concerne le transport, les communications, le commerce, les activités agropastorales, l’artisanat, les ressources énergétiques, l’industrie, la santé, l'assainissement, l’approvisionnement en eau potable, l’éducation et la protection de l'environnement;
3.les activités culturelles et sportives;
4.la sécurité, notamment la lutte contre la criminalité transfrontalière, le terrorisme, la piraterie et d’autres formes de criminalité;
5.le déminage des zones transfrontalières;
6.le développement institutionnel dans tous les domaines couverts par la présente Convention, y compris l’identification, la formulation et l’exécution de projets et de programmes;
7.tout autre domaine convenu par les États Parties.

Article 4 – Facilitation de la coopération transfrontalière

1.Les États Parties mettent tout en œuvre pour lever tout obstacle juridique, administratif, sécuritaire, culturel ou technique susceptible d'entraver le renforcement et le bon fonctionnement de la coopération transfrontalière. À cet égard, les États Parties se consultent régulièrement les uns avec les autres ou avec d’autres parties intéressées.
2.Conformément aux dispositions de la présente Convention, les États Parties coopèrent pleinement à la mise en œuvre du Programme frontière.

Article 5 – Partage d'informations et de renseignements

1.Tout État Partie fournit, dans la mesure du possible, les informations qui lui sont demandées par un autre État Partie, en vue de faciliter la mise en œuvre par celui-ci des obligations qui lui incombent en vertu de la présente Convention.
2.Tout État Partie prend les dispositions nécessaires pour encourager, promouvoir et faciliter le partage d’informations et de renseignements, tel que demandé par un autre État Partie, sur les questions liées à la protection et à la sécurité des zones frontalières.

Article 6 – Autorités compétentes ou organismes en charge des questions de frontières

Tout État Partie communique à la Commission, soit au moment de la ratification de la présente Convention ou de l'adhésion à celle-ci, soit le plus tôt possible après ratification ou adhésion, la liste des autorités compétentes ou des organismes en charge des questions de frontières selon son droit interne, qui feront alors office de point focaux.

Article 7 – Harmonisation du droit interne relatif aux zones frontalières

Les États Parties sont encouragés à harmoniser leur droit interne avec la présente Convention et à s'assurer que les administrations ou autorités territoriales locales dans les zones frontalières sont dûment informées des opportunités qui leur sont offertes et de leurs obligations en vertu de la présente Convention.

Article 8 – Mécanismes de mise en œuvre de la coopération transfrontalière au niveau des États Parties

1.Les États Parties s’engagent à appliquer les dispositions de la présente Convention et à œuvrer à la réalisation de ses objectifs, notamment à travers:
(a)la création de mécanismes de coopération, y compris des cadres juridiques;
(b)la prise en compte des dispositions de la Convention dans la formulation de leurs politiques et stratégies nationales;
(c)la soumission, tous les deux ans, de rapports sur les mesures prises dans le cadre de la mise en œuvre de la présente Convention.
2.Les activités relatives à la coopération transfrontalière sont entreprises par les collectivités ou autorités territoriales locales, telles que définies par le droit interne des États Parties.
3.Les administrations territoriales ou autorités frontalières décentralisées établies en vertu du droit interne des États Parties exercent leurs pouvoirs, y compris la conclusion d'accords de coopération avec des administrations territoriales ou autorités frontalières décentralisées relevant d’États Parties voisins, conformément au droit interne de leurs États respectifs.
4.Les États Parties peuvent établir des Comités consultatifs sur les frontières composés de représentants des organismes compétents pour aider, à titre consultatif, les collectivités et autorités frontalières dans l'examen des questions de coopération transfrontalière.

Article 9 – Mécanismes de mise en œuvre de la coopération transfrontalière au niveau des Communautés économiques régionales

1.La Commission crée un cadre de coopération avec les Communautés économiques régionales sur la mise en œuvre du Programme frontière, conformément aux objectifs de la présente Convention. À cet égard, la Commission demande aux Communautés économiques régionales:
(a)d’encourager leurs États membres à signer, ratifier ou adhérer à la présente Convention ou à y adhérer;
(b)de désigner des points focaux institutionnels pour la coordination, l'évaluation et le suivi de la mise en œuvre des engagements énoncés dans la présente Convention.
2.La Commission encourage chaque Communauté économique régionale à créer un Comité consultatif régional sur les frontières.
3.Les Comités consultatifs régionaux sur les frontières, composés de représentants désignés par les États membres des Communautés économiques régionales, aident ces dernières, à titre consultatif, dans l’examen des questions de coopération transfrontalière.
4.Les Comités consultatifs régionaux sur les frontières:
(a)apportent un appui à la formulation de politiques et à la définition d’activités de promotion de la coopération transfrontalière dans les domaines administratif, culturel, socio-économique et sécuritaire dans leurs régions respectives;
(b)élaborent des feuilles de route indiquant les actions nécessaires en vue du renforcement de la coopération transfrontalière;
(c)coordonnent l’ensemble des activités et la mobilisation des moyens requis pour la réalisation des objectifs énoncés dans la présente Convention;
(d)facilitent le dialogue et la consultation entre les autorités régionales et locales de part et d’autre des zones frontalières, sur demande des États Parties concernés;
(e)recommandent l'adoption de bonnes pratiques pour la gestion et l'administration efficaces des zones frontalières;
(f)examinent les problèmes que connaissent les populations vivant dans les zones frontalières et proposent des solutions, sur demande des États Parties concernés;
(g)font des recommandations sur les voies et moyens de promouvoir les activités transfrontalières entreprises par les différentes entités situées dans les zones frontalières, sur demande des États Parties concernés.

Article 10 – Mécanisme de mise en œuvre de la coopération transfrontalière au niveau continental

1.La Commission coordonne et facilite la mise en œuvre de la présente Convention par le biais du Programme frontière. En conséquence, la Commission:
(a)agit en tant que structure de coordination centrale pour la mise en œuvre de la présente Convention;
(b)appuie les États Parties dans la mise en œuvre de la présente Convention;
(c)coordonne l'évaluation de la mise en œuvre de la Convention avec les autres organes compétents de l'Union, les Communautés économiques régionales et les organismes nationaux compétents;
(d)met en place le Comité consultatif continental sur les frontières;
(e)appuie les efforts des États Parties en vue d'un partage effectif d'informations et de renseignements.
2.Le Comité consultatif continental sur les frontières est composé des représentants des Communautés économiques régionales, et opère sous les auspices de la Commission.
3.Le Comité consultatif continental sur les frontières est chargé des tâches suivantes:
(a)conseiller la Commission sur les questions relatives à la coopération transfrontalière;
(b)examiner et proposer des orientations générales pour promouvoir la coopération transfrontalière dans les domaines administratif, sécuritaire, socio-économique, culturel et dans d’autres domaines identifiés dans la présente Convention;
(c)identifier les actions prioritaires et les ressources requises pour la mise en œuvre de ces orientations;
(d)promouvoir les bonnes pratiques en matière de développement des régions frontalières;
(e)examiner les problèmes que connaissent les populations des zones frontalières et faire des recommandations, en coordination et avec l'approbation des États Parties concernés.

Article 11 – Fonds pour le Programme frontière

1.Il est institué un Fonds pour le Programme frontière, géré conformément au Règlement financier de l'Union africaine;
2.Les ressources du Fonds pour le Programme frontière proviennent:
(a)des contributions volontaires des États membres; et
(b)de recettes diverses, y compris les dons et subventions, conformément aux principes et objectifs de l’Union.

Article 12 – Dispositions de sauvegarde

1.Les dispositions de la présente Convention ne peuvent être interprétées de manière non conforme aux principes pertinents du droit international, y compris le droit coutumier international.
2.Aucune disposition de la présente Convention n’affecte les dispositions plus favorables relatives à la coopération transfrontalière prévues par le droit interne des États Parties ou dans tout autre accord régional, continental ou international applicable dans ces États Parties.
3.Dans la mise en œuvre de la présente Convention, les spécificités et les besoins particuliers des États insulaires seront pris en compte.

Article 13 – Règlement des différends

1.Tout différend né de l'application de la présente Convention est réglé à l'amiable, par voie de négociation directe entre les États Parties concernés.
2.Si le différend ne peut être réglé par voie de négociation directe, les États Parties s'efforcent de le régler par d'autres moyens pacifiques, y compris les bons offices, la médiation et la conciliation, ou tout autre moyen pacifique agréé par les Parties. À cet égard, les États Parties sont encouragés à recourir aux procédures et mécanismes de règlement des différends mis en place dans le cadre de l’Union.

Article 14 – Signature, ratification et adhésion

La présente Convention est ouverte à tous les États membres de l'Union, pour signature, ratification et adhésion, conformément à leurs procédures constitutionnelles respectives.

Article 15 – Entrée en vigueur

La présente Convention entre en vigueur trente (30) jours après la réception, par le Président de la Commission de l’Union africaine, du quinzième (15ème) instrument de ratification ou d'adhésion.

Article 16 – Amendement

1.Tout État Partie peut soumettre des propositions d'amendement ou de révision à la présente Convention.
2.Les propositions d'amendement ou de révision sont soumises au Président de la Commission de l’Union africaine, qui les transmet aux États Parties dans un délai de trente (30) jours suivant leur réception.
3.La Conférence de l'Union, sur recommandation du Conseil exécutif de l’Union, examine ces propositions à sa prochaine session, sous réserve que tous les États Parties en aient été notifiés trois (3) mois au moins avant le début de la session.
4.La Conférence de l’Union adopte les amendements, conformément à son Règlement intérieur.
5.Les amendements ou révisions entrent en vigueur conformément aux dispositions de l’article 15 ci-dessous.

Article 17 – Dépositaire

1.Les instruments de ratification ou d'adhésion sont déposés auprès du Président de la Commission de l’Union africaine.
2.Tout État Partie peut dénoncer la présente Convention en notifiant, par écrit, son intention un (1) an à l’avance au Président de la Commission de l’Union africaine.
3.Le Président de la Commission de l’Union africaine notifie aux États membres toute signature de la présente Convention, le dépôt de tout instrument de ratification ou d’adhésion, ainsi que son entrée en vigueur.
4.Le Président de la Commission notifie également aux États membres les demandes d’amendement ou de retrait de la Convention, ainsi que les réserves à celle-ci.
5.Dès l'entrée en vigueur de la présente Convention, le Président de la Commission de l’Union africaine l’enregistre auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations unies, conformément à l’article 102 de la Charte des Nations unies.
6.La présente Convention, rédigée en quatre (4) textes originaux en Arabe, en Anglais, en Français et en Portugais, tous les quatre (4) textes faisant également foi, est déposée auprès du Président de la Commission de l’Union africaine, qui en transmet une copie certifiée conforme à chaque État membre dans sa langue officielle.
Adoptée par la vingt-troisième Session Ordinaire de la Conférence tenue à Malabo, Guinée ÉquatorialeLe 27 Juin 2014
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